Nérac fut le deuxième poste qu’occupa Georges Eugène Haussmann durant sa longue carrière dans l’administration préfectorale. Après un bref passage à la préfecture de la Vienne, il fut nommé à 23 ans sous-préfet de Nérac où il demeura de 1832 à 1840. Il y montra durant cette période un intérêt certain pour la modernisation des voies de communication à l’intérieur de son arrondissement. Cet intérêt se manifestera, plus particulièrement, dans ses interventions dans la ville de Nérac dont il modifiera les relations physiques avec son territoire environnant. Cette action se portera surtout dans la mise en œuvre d’une relation directe entre Nérac et Agen chef-lieu du département.
L’histoire locale raconte, en effet, que cette prise de conscience lui fut particulièrement confirmée lors de son arrivée à Agen. Afin de rejoindre son poste, faute de liaison directe, il dût emprunter un parcours l’amenant largement en aval d’Agen, sur la rive droite de la Garonne, pour retrouver l’axe historique desservant Nérac. La création d’une liaison directe avec Agen s’accompagnera de plusieurs interventions.
La réalisation d’un nouveau pont sur la Baïse
Il n’existait jusqu’alors qu’un pont médiéval situé en aval du château pour assurer une liaison entre les deux parties de la ville le grand et le petit Nérac, situées de part et d’autre de la rivière. Au droit du château subsistait un vieux pont qui reliait le château au parc de la Garenne, vestige de l’ancienne organisation du domaine, qui comprenait trois parties le château et le jardin du Roi en aval avec la Garonne en vis-à-vis sur l’autre rive.
La réalisation d’un nouveau pont sera confiée à Jacques-Samuel de Bourousse de Laffore. Ce nouveau pont, dit Pont Neuf, sera réalisé en pierre, constitué d’une seule arche de 27 mètres d’ouverture, traitée en anse de panier. D’une hauteur nettement plus élevée que le précédent il sera achevé en 1837.
La mise en œuvre d’un ensemble de voies traversant la ville à partir de 1833
Ce nouveau parcours s’organise autour de trois actions :
• La création d’une voie nouvelle longeant le Petit Nérac et assurant la liaison entre le Pont Neuf et la route vers Agen. Cette voie traversant le parc de la Garenne fut réalisée sur le registre d’une grande avenue urbaine plantée, de part et d’autre, d’une double rangée d’arbres.
• Le percement d’une voie traversant le centre historique de Nérac. Cette rue nouvelle permet la liaison entre les allées d’Albret, situées sur l’emprise des anciennes fortifications et assurant un rôle de boulevard périphérique, et le Pont Neuf. Son tracé nécessite le percement d’un îlot existant.
• L’utilisation de l’emprise des anciennes douves du château pour assurer le bouclage entre la voie nouvelle et le Pont Neuf. Ce nouvel itinéraire replacera Nérac au cœur d’un dispositif entre les liaisons Nord-sud, liaison historique Bordeaux-Condom, et Est-ouest, Mont-de-Marsan-Agen.
Cet ensemble de travaux concrétisera le démantèlement de l’entité constituant le domaine du château.
Ce démembrement était déjà engagé à l’issue de la Révolution. Il s’était manifesté par la démolition partielle du château accompagnée d’un lotissement tant sur l’emprise des bâtiments que sur les espaces du jardin de la rive droite associés au château. Néanmoins, bien que parcellaire, l’entité géographique du domaine demeurait encore intacte à l’arrivée du préfet Haussmann. La création de l’avenue d’Agen, à l’Est, formalisera la séparation entre le parc de la Garenne et l’ensemble du Petit Nérac sur la rive droite.
De fait, la Garenne, conservée pour l’essentiel, deviendra un parc public autonome, associé à la nouvelle entrée de Nérac. L’utilisation de l’emprise des douves actera la séparation entre le site du château et son accompagnement immédiat en continuité constitué par le jardin de la rive gauche en aval de celui-ci.
La création de la nouvelle voie vers l’Est, destinée à relier Nérac et Agen, constituera une nouvelle entrée de ville mettant en scène une nouvelle perception de la cité.